La conférence thématique organisée le 2 juin 2023, dans le cadre de l’Assemblée générale de l’UCESIF, était consacrée au thème : « La place des Conseils Economiques et Sociaux de l’espace francophone dans la gouvernance de l’eau ». Elle était animée par plusieurs experts et suivie de la visite d’une infrastructure de traitement et de distribution d’eau. Trois moments forts ont ponctué cette conférence thématique : l’ouverture des travaux, la communication introductive et les travaux en panels.

L’ouverture de la conférence a été marquée par les allocutions du Président du CES du Bénin, Monsieur Tabé GBIAN, du Secrétaire Général de l’UCESA, Monsieur Younes BENAKKI et du Président de l’UCESIF, Monsieur Thierry BEAUDET. 

Dans ses propos, le Président Tabé GBIAN a félicité l’ensemble des participants pour le travail réalisé, la veille. Il a, ensuite, mis en exergue les enjeux actuels en matière d’accès à l’eau tout en faisant ressortir les grandes réalisations du Gouvernement béninois en vue de l’atteinte de l’objectif de développement durable n°6 des Nations Unies sur l’eau, avant de conclure en indiquant quelques pistes de réflexion aux participants.

Quant à Monsieur BEAUDET, il a aussi mis l’accent sur l’importance de la question de l’eau et a fait savoir que le thème sur la gouvernance de l’eau a été retenu pour la première année de la mandature du Conseil Economique, Social et Environnemental (CESE) de France. Cette proposition a reçu l’aval de ses pairs et des Conseils membres du Bureau, sur le principe d’un travail collectif sur l’Objectif de Développement Durable n°6 des Nations Unies. Il a, enfin, présenté la méthodologie à adopter dans la conduite des réflexions.

Le Secrétaire Général de l’UCESA a, sur la base des données statistiques, décrit l’ampleur du phénomène de rareté croissante des ressources en eau due à de nombreux facteurs dont le plus important est celui du changement climatique. Il a, ensuite, donné quelques indications sur les résultats de l’enquête de perception du citoyen sur le changement climatique, une composante du projet de l’UCESA sur l’action climatique, lancée depuis décembre 2019. Enfin, il a exprimé l’engagement de cette Institution faîtière dans la question de l’eau qui, selon lui, se révèle être plus préoccupante en Afrique que partout ailleurs dans le monde.

A la suite des allocutions, la communication introductive a été présentée par Monsieur René NGONGO MATESO, Rapporteur au Conseil Economique et Social de la RDC. Dans ses propos, Monsieur NGONGO s’est référé au forum économique mondial (Davos) de 2015 qui avait déjà évalué les cinq plus grands risques à l’échelle mondiale pour les dix prochaines années. La crise de l’eau est citée en premier lieu, suivie de l’échec de l’adaptation au changement climatique et de l’atténuation de ses effets, des événements météorologiques extrêmes, de la crise alimentaire et de la profonde instabilité sociale. Pour lui, les quatre premiers risques sont très étroitement liés à l’eau, qui, entre excès, pénurie et qualité, risque de devenir le premier problème mondial, frappant l’humanité de plus en plus fréquemment et fortement.

Il a, ensuite, indiqué que la récurrence des catastrophes était au cœur des préoccupations majeures lors de la récente conférence des Nations Unies sur l’Eau tenue à Washington, en mars 2023. Dans son analyse, Monsieur NGONGO a fait ressortir que les eaux douces ne représentent qu’environ 3% des stocks d’eau de la planète. Il est prédit par plusieurs scientifiques que, dans les décennies à venir, aucune autre ressource renouvelable ne pourra se montrer aussi critique que l’eau, au regard des besoins sociaux et environnementaux. A l’en croire, suite à la pollution de l’eau et à la mauvaise gouvernance, des pays disposant de grandes réserves d’eau douce peuvent connaitre des graves problèmes d’accès et de pollution de ces eaux. Il a, alors, proposé une accélération des engagements à garantir la sécurité de l’eau, notamment par une gouvernance renforcée, des politiques de l’eau adaptées et le développement de partenariats avec le secteur privé pour permettre une transition efficace vers l’économie verte ; une meilleure intégration du genre dans les initiatives locales d’accès à l’eau et à l’assainissement et le renforcement de l’appui aux initiatives portées par la jeunesse dans le secteur de l’eau et de l’assainissement ; un recours aux solutions basées sur la nature et l’investissement dans les infrastructures résilientes aux changements climatiques pour résoudre les problèmes liés à l’eau tels que la protection contre les inondations, les érosions, la purification des eaux usées et le stockage de l’eau. Il faudrait, donc, encourager les recours aux solutions naturelles (infrastructures naturelles) et une augmentation de l’investissement dans la recherche et le renforcement des capacités en vue d’améliorer la capacité prédictive et de mettre en place de nouvelles technologies innovantes de la gestion des ressources en eau.

 

Les travaux en panels

Dans le cadre des travaux de la conférence thématique, trois panels ont été constitués avec différents sous-thèmes. 

 

Panel n°1 : La gouvernance mondiale de l’eau et l’espace francophone

Ce panel a eu pour modérateur, Monsieur Moncef ZIANI, expert en économie bleue au CESE de Maroc. Les panélistes étaient invités à détailler les initiatives prises par leurs organisations en matière de gouvernance de l’eau et appelés à échanger ensemble sur les constats qui sont les leurs et les approches de solutions en la matière. Il s’agit de Monsieur Agnidé Emmanuel LAWIN, Directeur de Cabinet du Ministre béninois de l’Energie, de l’Eau et des Mines ; le Secrétaire Général de la Commission Nationale Permanente de la Francophonie (CNPF) au Bénin, Monsieur Paulin AGBETOKPANHOUN ; le Représentant Résident du Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD) au Bénin, Monsieur Aoualé Mohamed ABCHIR et un représentant du Conseil Economique, Social et Environnemental du Sénégal, Monsieur GUEYE.

Les débats qui ont suivi les exposés de ce panel, avaient pour centres d’intérêt, les modèles de cadre institutionnel dans le contexte de la décentralisation, le point d’inflexion à donner à la question de l’eau en lien avec le changement climatique, le genre de structure (publique ou privée) la mieux adaptée à une gouvernance de l’eau plus profitable, la nature des financements (purement étatiques, alternatifs ou innovants), la place de la question de l’eau dans la structure gouvernementale. Il est à retenir que, des nombreuses interventions, il ne s’est pas dégagé un cadre de gouvernance type universellement applicable. Chaque pays pourrait tenir compte de ses réalités pour concevoir le cadre de gouvernance qui lui convient.

De riches récits d’expériences en matière de gouvernance ont jalonné les interventions qui ont permis aux uns et aux autres de les partager et d’en faire d’importantes idées pouvant servir de modèles aux différents CES.

Panel n°2 : La valorisation et l’utilité des travaux des Conseils Economiques et Sociaux francophones sur la question de la gouvernance de l’eau

Ce panel a eu pour modérateur, Monsieur Adrien LABAUNE, Secrétaire Général de l’UCESIF. Il était composé des experts ci-après : Monsieur Victor GBEDO, Conseiller au CES du Bénin et Président de la Commission du Développement Rural et de l’Environnement ; Madame Corina-Andrea MURAFA BENGA, Conseillère au Conseil Economique et Social de la Roumanie ; Monsieur Hachim EL AYOUBI, Conseiller au CESE de Maroc, Vice-Secrétaire Général de l’Association Internationale des Conseils Economiques et Sociaux et Institutions Similaires (AICESIS) et Représentant de l’UCESA ; Monsieur Raphaël TCHIMANGA, expert Représentant le CES de la RDC.

Les participants du panel n°2 étaient invités à s’exprimer sur les innovations, les pistes de réflexions sur les travaux des CES en la matière et sur la manière dont il est envisageable qu’ils s’insèrent dans les grands projets locaux, nationaux, régionaux et internationaux.

Les échanges qui ont suivi les exposés de ce panel ont principalement porté sur les bonnes pratiques et les innovations des CES/IS en vue de faire entendre la voix des citoyens à la base, principalement en ce qui concerne la question de la gouvernance de l’eau. Monsieur Victor GBEDO a mis l’accent sur le fait que le CES du Bénin a beaucoup travaillé sur la question de l’eau. En citant quelques sujets, il a décrit la méthodologie suivie dans le cadre de l’étude des sujets d’autosaisine. Ladite méthodologie permet aux membres de l’Institution de descendre sur le terrain, d’aller au contact des populations pour recueillir leurs préoccupations et toucher du doigt les réalités qui sont liées aux questions en étude. Des personnes ressources et acteurs, aussi bien étatiques que non étatiques, sont auditionnés dans cette procédure. Cette pratique qui s’exerce aussi dans le cadre des séminaires, ateliers, colloques et autres rencontres organisés par l’Institution, est un outil indispensable d’implication effective des citoyens à la base dans le processus de prise de décisions engageant leur vie.

Les autres panélistes ont corroboré les propos du Conseiller GBEDO du Bénin en mettant l’accent sur la symbiose entre le travail des Conseillers des CES et les scientifiques, le projet de l’UCESA qui constitue en lui-même un exemple palpable de participation citoyenne et les démarches qui permettent d’impliquer les citoyens à savoir : l’utilisation de l’outil informatique, la mise en place de diverses plates formes, l’outil de sondage, les ateliers, les focus groups, la nature même des CES/IS de par leur composition.

 

Panel n°3 : Quelles solutions pour une gestion de l’eau toujours plus inclusive dans l’espace francophone ?

Ce panel a eu pour modérateur, Monsieur Albin FELIHO, Conseiller au CES du Bénin, Représentant du Patronat et Président du Conseil National des Entreprises du Bénin (CONEB).

Les participants du panel n°3 étaient invités à détailler leurs besoins en termes de coopération, et à échanger sur l’utilité et le bien-fondé d’un dialogue toujours plus fort entre les sociétés civiles francophones en matière de gestion de l’eau. 

Etaient présents à ce panel, Monsieur Barthélémy KASSA, Ancien Ministre du Bénin chargé de l’eau, Vice-Président de l’Assemblée Nationale du Bénin et Représentant l’Assemblée Parlementaire de la Francophonie (APF) au Bénin ; Monsieur Martial KPOCHAN, représentant le Groupement du Patronat Francophone (GPF) ; Monsieur Jérôme BERTRAND-HARDY, Directeur de l’Agence Française de Développement (AFD) et Monsieur Rachid RGUIBI, Ambassadeur du Royaume du Maroc au Bénin.

Les discussions consécutives aux différentes interventions des panélistes ont débouché sur des contributions en termes de solutions pour une gestion de l’eau plus inclusive dans l’espace francophone. Il s’agit de : mettre en place une gouvernance résiliente et innovante des ressources en eau fondée sur une approche participative à travers les systèmes de représentation efficace ; exploiter convenablement les résultats issus des innovations technologiques ; créer un observatoire en matière de gouvernance de l’eau ; renforcer la protection des populations contre les catastrophes liées à l’eau ; consulter, plus régulièrement, les Conseils Economiques et Sociaux et Institutions Similaires (CES/IS) en vue de profiter de leurs expertises ; exploiter les avis et recommandations des CES/IS ; mettre en place des mécanismes innovants de coopération transfrontalière inclusive au sein de l’espace francophone ; renforcer la solidarité entre pays dépourvus de ressources en eau et ceux pourvus en ces ressources ; renforcer l’appui aux comités de gestion des bassins ; renforcer la recherche sur les questions de l’eau ; promouvoir plus de redevabilité au niveau des collectivités locales et instituer des séances formelles d’échanges et de dialogue entre les élus locaux et les populations pour plus d’efficacité dans la résolution des problèmes des communautés en matière de gestion de l’eau.

A l’issue des travaux, les CES/IS des Etats et Gouvernements membres de la Francophonie, présents à Cotonou, ont adopté à l’unanimité la déclaration de Cotonou sur la gouvernance de l’eau. Cette déclaration constitue le document concret qui résume les résultats des assises.

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